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12 avril 2010 1 12 /04 /avril /2010 15:50

 

 

jeux

 

« la Règlementation des jeux et le régime politique », intervention dans le colloque Jeux et Société (en mars 2006), in Jeux de Hasard et société, Paris, L’Harmattan, 2008.

 

cet article qui portait sur l'exception juridique en matière de jeux vient d'être profondément modifié avec la libéralisation des jeux sur internet.

 

extraits:

"La journée d’hier nous a permis de comprendre la place des jeux dans notre société actuelle. La réglementation en la matière en France souligne les particularités de ce domaine non seulement en droit mais aussi en histoire, en sociologie ou en psychiatrie. Les jeux occupent assurément une place particulière et ce en raison des contours souvent flous de leur législation. J’aimerais ici rebondir sur la réglementation actuelle des jeux en France pour aborder un aspect plus spécifique[1], l’évolution qui a conduit à cette situation. En droit la réglementation d’une activité suppose d’en fixer le cadre, d’en protéger l’exercice. Pour le jeu il s’agit par conséquent d’examiner sa réglementation c’est-à-dire l’approche qui en a été faite. Pour circonscrire le sujet, je m’intéresserai principalement à trois jeux de hasard et d’argent : casinos, courses de chevaux et loteries. Le régime français actuel, une démocratie fondée sur une constitution républicaine fait une place spéciale aux jeux, place assez inattendue que nous commençons à cerner. En a-t-il toujours été ainsi ?

La France a connu durant ces deux derniers siècles près de 15 régimes différents, allant de la monarchie à la république en passant par l’empire. Leur fondement était tantôt une représentation limitée de la population, tantôt la souveraineté du peuple. Un principe semble toutefois apparaître : en matière de libertés publiques, cette histoire a conduit de manière quasi générale à une libéralisation des activités. La stricte interdiction a ainsi été remplacée par la tolérance puis par la réglementation de la liberté. La presse a par exemple connu la censure et le cautionnement avant d’être libre, la liberté syndicale a d’abord été fondée sur une exception d’une interdiction générale. Le principe de notre régime politique paraît donc être la liberté d’une activité que l’on peut limiter ou encadrer dans certaines circonstances ou pour la rendre compatible avec une autre. C’est ce que nous appelons juridiquement la démocratie matérielle, la garantie des libertés dans un régime fondé sur l’expression populaire. Dans cette perspective, la réglementation des jeux aurait dû suivre la même logique, c’est du moins une hypothèse plausible. Or il n’en est rien.

L’interdiction reste le principe en la matière aujourd’hui et ce malgré des volontés d’évolution exprimées durant ces dernières années. L’une des lois toujours en vigueur aujourd’hui date même de 1836[2]. Elle sert toujours de fondement aux décisions juridictionnelles en la matière comme le prouve celle rendue par le Conseil d’Etat le 15 mai 2000, syndicat des casinos de France[3]. La même loi est d’ailleurs appliquée en Polynésie française de manière identique[4]. Cette situation semble être une particularité, voire une singularité, dans nos libertés. S’agit-il d’un reflet fidèle de la réalité ? Assurément. Mais, il convient peut-être d’en souligner aussi la relativité. La pratique des jeux d’argent tels que nous les avons définis met en exergue une évolution. La démocratisation n’a pas conduit à une remise en cause du principe d’interdiction posé par les régimes antérieurs. Néanmoins, la situation actuelle est aussi caractérisée par une évolution de la limitation. Les dérogations en matière de jeux sont en effet plus étendues. "



[1] Cet article reprend la contribution faite au colloque jeux et société en mars 2006 ; l’actualité récente m’a toutefois conduit à ajouter certains développements.

[2] Loi générale sur les jeux du 21 mai 1836, Duvergier, p. 79 et suiv.

[3] CE 9ème et 10ème sous-sections réunies, décision 190450, inédite au Lebon.

[4] CE 30 juillet 1997, Haut commissaire de la République en Polynésie française, avis 187320, recueil Lebon.

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