Dans ce deuxième tome d'Histoire constitutionnelle américaine, la période étudiée s’étend de 1860 à 1937. Elle s'ouvre avec la crise majeure traversée par la Fédération, la Guerre civile, et se referme avec la victoire de Roosevelt sur la Cour suprême et la consécration d'un pouvoir fédéral étendu suite à la décision National Labor Relations Board v. Jones & Laughlin Steel Corp.
Durant ces huit décennies, le régime américain oscille entre Démocratie et Fédération, entre droit des États et extension des pouvoirs fédéraux. Il traverse de multiples crises, institutionnelles, sociales ou encore financières. Les réactions qu’elles déclenchent transforment les fondements juridiques en permettant une victoire des aspects démocratiques sur les logiques fédérales d'éclatement. Ce laps de temps comprend de nombreux débats majeurs, portant sur les droits des Noirs, le vote des femmes, la consommation d'alcool et sa potentielle interdiction ou encore la question fiscale et la compétence fédérale. En moins d'un siècle, les États-Unis vont connaître des modifications primordiales de leurs priorités et de leur assise en matière juridique. Dans la période précédente, les questionnements étaient déjà nombreux mais ils visaient d'abord et avant tout le fonctionnement de la Fédération et son maintien. Dans cette nouvelle époque, la montée de revendications politiques nouvelles ébranle l'organisation institutionnelle et les équilibres politiques. À cet égard, les choix qui sont effectués permettent d'identifier des logiques distinctes en matière de droits fondamentaux et concernant les procédures électorales. La question d'une intervention du peuple et d'une garantie des droits au niveau fédéral ou au niveau étatique occupe le devant de la scène politique.
C'est cette Histoire que l'on découvre au travers des documents juridiques établis par les pouvoirs fédéraux, Présidents, Congrès ou encore Cour suprême, et par les structures étatiques. Ce voyage est l'occasion de se replonger dans les discours d'investiture, les principaux textes législatifs, certains grands arrêts et naturellement les révisions constitutionnelles. Dans une optique générale, on ne peut pas se concentrer uniquement sur les textes et leur contenu, au regard de l'importance des débats qui se tiennent dans les différentes instances fédérales ou locales. Les personnalités ne manquent pas, qu'elles occupent le poste de chefs de l'exécutif, Abraham Lincoln, Andrew Johnson, Ulysses Grant, Rutherford Hayes, qu'elles interviennent au sein de la Cour suprême, John Marshall Harlan, Oliver Wendel Holmes, ou encore sur les bancs du Congrès, Thomas Corwin, John Jordan Crittenden, Joseph Bristow ou Elihu Root. Les interventions de ses acteurs permettent de comprendre l'édification du droit américain à cette époque et sa transformation au contact d'un certain nombre de questionnements sur le devenir de la société américaine, sur le fonctionnement de l'organisation fédérale et sur la place du peuple dans cette organisation.
Comme dans le tome précédent, les textes sont analysés en mettant en avant leur contexte et leur signification juridique et politique. Les choix opérés ont pour dessein de mettre en exergue les principaux documents au regard de leurs conséquences historiques et politiques et en tenant compte de leur arrière plan juridique. Dans cette mesure, l'analyse juridique doit intégrer plusieurs dimensions. D'une part, il est indispensable de comprendre l'ensemble des facteurs qui ont conduit à la rédaction du document. Dans ce cadre, une plongée dans le passé plus ou moins récent est évidemment nécessaire. D'autre part, il faut tenir compte des conditions d'adoption du document, de la procédure de ratification lorsqu'il s'agit d'un amendement constitutionnel, du contexte de rédaction lorsqu'il s'agit d'un discours d'investiture ou encore des débats qui ont conduit à l'adoption d'un texte législatif. Enfin, une telle analyse induit une étude des conséquences. Sur ce point précis, nous conserverons l'approche adoptée dans le premier ouvrage, c'est-à-dire une analyse concernant les conséquences immédiates d'un document. À quelques rares exceptions près, il ne sera donc pas question ici de mettre en perspective l'ensemble des conséquences à long terme d'une modification législative ou constitutionnelle. Ce principe connaît quelques exceptions puisque dans un certain nombre de cas les références au devenir ultérieur de la mesure sont pertinentes afin d'en appréhender toutes les dimensions en droit constitutionnel américain.